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Volume 1, no 3 |
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El Salvador: défis et possibilités du nouveau gouvernement |
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Pour télécharger le texte français en format PDF, cliquez ici Pour télécharger le texte espagnol en format PDF, cliquez ici El Salvador: défis et possibilités du nouveau gouvernementCésar Sención VillalonaProfesseur universitaire, chercheur de l’Asociacion Equipo Maíz, une association salvadorienne d’éducation populaire
Le gouvernement salvadorien actuel, qui a commencé son mandat en juin de l’année dernière, s’est retrouvé avec une situation économique assez précaire, aussi bien à cause de la crise mondiale qui affecte le pays, que comme résultat des politiques économiques appliquées pendant 20 ans par le gouvernement du parti Alianza Republicana Nacionalista (ARENA) [1]. L’état de l’économie Dans le court terme, le problème principal de l’économie est la mauvaise situation financière du gouvernement, qui a besoin de trouver 500 millions de dollars américains pour compléter le 15 % de ses dépenses de fin d’année. Le gouvernement a aussi une accumulation de dette de 7 098 millions de dollars américains, qui équivaut à 32 % du produit intérieur brut (PIB). De ce montant, le gouvernement doit payer à court terme 816,7 millions, une somme très élevée pour ses faibles finances (toutes les statistiques proviennent de la Banque Centrale de Réserva (BCR). Une autre situation problématique est celle de la diminution de la production nationale qui, après évaluation, finira l’année avec un taux négatif de 2 % (CEPAL, Étude Économique sur l'Amérique Latine et les Caraïbes 2008-2009). La production diminue parce qu’il y a moins d’investissements publics et privés. Il y a également des problèmes qui touchent le commerce extérieur. Les ventes mondiales (exportations) ont diminué de 16,6 % pendant le premier semestre cette année à cause de la crise mondiale, surtout aux États-Unis, où El Salvador réalise 50 % de ses ventes à l’extérieur. Les achats (importations) ont connu une baisse de 28,7 % pendant la même période, car les entreprises diminuant leurs investissements, elles achètent moins de matières premières et de biens de capital, qui pour leur majeure partie proviennent de l’étranger. Les importations de matières premières ont diminué de 48 %, celles de biens de capital (machinerie, équipements et autres) de 34 %, et celles de biens de consommation de 27.5 %. D’un autre côté, les envois de fonds aux familles, qui constituent l’une des principales sources de devises, ont baissé de 10,8 % pendant les sept premiers mois de l’année, par rapport à l’année précédente. La baisse des envois a affecté des centaines de milliers de familles qui les reçoivent. Certains aspects positifs de mesures mises de l’avant par l’ancien parti au pouvoir, dont bénéficie le nouveau gouvernement, sont un taux d’inflation faible (0,4 % pour le mois de juillet) et un montant adéquat de réserves monétaires, qui au mois de juillet se chiffrait à 2 678 millions de dollars américains. Ce montant équivaut à trois mois et demi d’importations, qui est le chiffre correspondant aux paramètres établis par les organismes financiers internationaux. Même si l’état actuel de l’économie est précaire, le gouvernement actuel – conduit par le Front Farabundo Martí pour la Libération Nationale (FMLN) – s’est engagé à prendre les mesures nécessaires pour changer la structure productive et redistribuer la richesse. Pendant les vingt années du gouvernement d’ARENA, la structure économique du pays a changé substantiellement. En arrivant au pouvoir en 1989, ARENA a trouvé un pays dépendant des envois de fonds aux familles et de l’aide du gouvernement des États-Unis, deux sources de revenus qui dépassaient les exportations de café et de coton, les deux figures principales de l’économie pendant plusieurs décennies. Mais avec le Programme d’ajustement structurel mis en place par ARENA, un nouveau changement s’est opéré : la production agricole a baissé sensiblement et l’économie est devenue principalement une économie d’importation et financière. L’ajustement a consisté en la privatisation d’un grand nombre d’entreprises publiques (les banques, les compagnies téléphoniques, les entreprises de distribution de l’énergie, les caisses de retraite, les moulins de canne à sucre, etc.), en une réduction draconienne des taxes de douane (encore élargie par les Accords de libre-échange avec les États-Unis, le Mexique et le Chili) et en une réforme des impôts favorable aux grandes entreprises (suppression de l’impôt sur les exportations de café et de sucre et sur le patrimoine, réduction de moitié de l’impôt sur les revenus, etc.). Le résultat du Programme d’ajustement a eu pour conséquence une plus grande ouverture de l’économie vers l’extérieur, les importations se sont accrues et les activités agricoles se sont effondrées. Résultat de l’arrivée massive de dollars provenant d’envois de fonds et de la reconstruction d’après-guerre, l’ouverture commerciale (1992-2000) a fait du commerce d’importation l’activité la plus rentable de l’économie, vers laquelle les banques dirigent 25 % de leurs crédits. À la suite de la dollarisation commencée à partir de 2001, qui a éliminé le risque de dévaluations, et aux Accords de libre-échange mis en vigueur plus tard, les importations ont connu une telle croissance qu’elles représentent le double des exportations, lesquelles ont augmenté à un taux beaucoup moindre, et cela principalement pour des entreprises de sous-traitance. Les importations sont si importantes que pour l’an 2008, où elles ont atteint les 9 754 millions de dollars américains, elles ont dépassé la production industrielle et la production agricole réunies, ce qui, en argent, représentait 7 145 millions. De plus, les importations de biens de consommation (2 974 millions) furent plus importantes que la production agricole. La croissance ininterrompue des importations a affecté le secteur agricole, surtout la petite production paysanne, qui fut très touchée par d’autres politiques du gouvernement, comme la suppression des prix de garantie ; la libéralisation des biens de production, qui connurent une augmentation de prix exagérée ; la libéralisation des taux d’intérêt, qui doublèrent presque pendant les années 1990 ; et l’augmentation des prix de l’énergie, entre autres. La crise du secteur agraire se manifeste dans la diminution de sa contribution à la production nationale (de 20 % en 1999 à 12 % en 2008), dans une baisse de la production de grains alimentaires, de celle des cultures maraîchères et dans la diminution du cheptel. Une bonne partie de la population rurale a émigré vers l'étranger et vers les villes, dans lesquelles le secteur informel de subsistance croît sans cesse. En 1990, elle représentait 60 % de la population totale du pays, tandis qu'en 2007 elle n'était plus que de 37 % [2]. Les envois de fonds soutiennent l'économie, car c'est avec eux que sont financées les importations de biens agricoles, de biens de production et de ressources techniques. Les grands patrons, qui pendant des années ont placé leurs capitaux dans le café et le coton, ont transféré une bonne partie de leurs investissements vers les activités d'importation, le commerce interne et les institutions bancaires. En 2008, ils ont vendu les banques, mais pas entièrement, car les acheteurs ont payé une partie de l'argent avec des actions des banques faisant elles-mêmes l'objet de l'achat. Le plan anticrise du gouvernement Le nouveau gouvernement se retrouve non seulement avec une situation économique détériorée, mais avec en outre une forte exigence d'une grande partie de la population, qui désire améliorer leurs conditions de vie précaires. El Salvador a une population dont 40 % est en condition de pauvreté, l'environnement se trouve dans une situation grave, il y a un taux d'analphabétisme de 15 %, une mortalité infantile de 22 pour mille, et un manque de logements qui affecte 35 % des familles [3]. En outre, l'insécurité des citoyens est si alarmante qu'en moyenne douze personnes sont assassinées chaque jour. Les défis pour le gouvernement sont de taille, car il doit non seulement équilibrer et développer l'économie, mais il doit aussi améliorer les conditions de vie d'une grande quantité de personnes. C'est-à-dire qu’il devra intensifier l'activité économique et redistribuer la richesse, car il n'y a que de cette façon qu'il pourra réduire substantiellement la pauvreté. C'est ce qu'attendent les habitants du pays qui ont voté pour le FMLN. Afin de soutenir la production, sera créée une banque d'État d'encouragement à la production (reconvertie à partir de la Banque multisectorielle d'investissements) ; on donnera des garanties de crédit aux entreprises micros, petites et moyennes. L'État importera des biens de production et les vendra au prix d'achat à 450 000 producteurs en 2009, et à 600 000 en 2010. On démarrera des programmes de formation pour les femmes et les jeunes. On étendra les services publics et l'infrastructure de base et on construira et réaménagera 25 000 logements d'intérêt social. Le programme de protection sociale comprend le réaménagement intégral des habitats urbains et ruraux (actions sur la santé, l'éducation, la mise en échec de la violence, la formation, les infrastructures et le logement). Notons une volonté du gouvernement de poser des gestes concrets en matière de santé et d’alimentation, tels que l'élargissement du programme d'aliments scolaires, la fourniture gratuite de médicaments essentiels, d'uniformes et d'articles scolaires, un plus grand accès aux soins de santé de la sécurité sociale et l'élimination des contributions volontaires dans le système de santé publique. Pour renforcer les finances publiques, le gouvernement appliquera un programme d'austérité à la dépense publique. Il rationalisera ou éliminera des subsides à l'électricité, au gaz liquéfié extrait du pétrole, aux transports et à l'eau. Il réformera la Loi d'acquisitions et de contrats de l'Administration publique, et il combattra la corruption, l'évitement et l'évasion fiscale. Pour appliquer des politiques de développement, le gouvernement promeut un dialogue national avec les entreprises et les organisations sociales. Il créera un Conseil économique et social regroupant les acteurs issus de ces mêmes secteurs, et il mettra en place des politiques d'État touchant à des questions stratégiques. Ce plan pourrait atténuer les effets de la crise économique et ses répercussions sur la population aux revenus les plus faibles. Ce qui n'est pas clair encore, c'est d'où viendront les ressources pour sa mise en vigueur, car le gouvernement n’a pas encore pris de mesures pour contrôler l'évasion fiscale. Le contrôle de l'évitement est plus difficile, car il implique des changements dans la législation fiscale, qui ne peuvent pas se faire si la droite au Congrès ne concède pas les votes nécessaires, car le FMLN n'a que 35 députés sur 84, c'est-à-dire qu'il n'a pas la majorité simple nécessaire pour l'approbation ou la modification des lois. Le président de la République, Mauricio Funes, opte en faveur d’une négociation d'un pacte fiscal avec les grandes entreprises, afin que celles-ci apportent une partie de l'argent qu'elles évitent de contribuer. Il met aussi l'accent sur la nécessité de réorienter les prêts approuvés et d’obtenir 1 800 millions de dollars de financement externe au moyen de la vente de bons. Mais le premier point dépendra de la bonne volonté des chefs d'entreprise, qui sont clairement associés au parti ARENA, et le deuxième point requiert l'approbation du Congrès, où le FMLN se trouve en minorité. Le ministre du Revenu, penche pour la promotion d'une réforme fiscale, qui nécessiterait également des votes de la droite au Parlement. Ces difficultés limitent les possibilités du Plan anticrise. Les dirigeants d'ARENA exigent, en échange de leur soutien aux prêts et aux bons, l'approbation d'un métrobus pour la capitale, dont le maire est affilié à leur parti, l'élection d'un procureur de leur parti, et l’engagement du gouvernement de ne pas congédier d’employés publics. Si le gouvernement parvient à négocier, il obtiendrait les ressources nécessaires pour le plan, en échange du revers politique qu'implique de nommer comme procureur une personnalité très controversée dans le pays. S'il n'y a pas de négociation, le gouvernement sera obligé de contrôler l'évasion fiscale et de chercher des soutiens externes à son programme. Cela signifierait une confrontation avec les hauts dirigeants, et un rapprochement avec les gouvernements de Cuba et du Venezuela, qui sont ceux qui pourraient apporter le plus de soutien au programme social. Les réformes structurales Le programme du FMLN propose la réactivation de la production nationale, surtout la production agricole, pour augmenter l'approvisionnement en aliments, créer des emplois, freiner l'émigration et redistribuer la richesse nationale. La réussite de cet objectif nécessiterait de changer la principale activité économique, soit celle qui articule le développement de l'économie dans son ensemble. Pendant de nombreuses années, le modèle agricole et du café a primé. À l'heure actuelle, c'est un modèle d’échange commercial qui prime, et qui est surtout orienté à l'importation. L'évolution du secteur financier et des finances publiques, et celle de l'emploi et des revenus nationaux, dépendent de l'évolution du commerce. La crise du secteur agraire ne désarticule plus l'économie. Par contre, la crise du commerce entraîne avec elle l'économie nationale. C'est là la réalité actuelle du pays. Changer cet état de choses, c'est aller à l’encontre des des groupes d'entrepreneurs les plus puissants, car impulser la production nationale signifie asséner un coup au commerce d'importation et au système financier qui y est rattaché. De telle sorte, que le changement de modèle passe par une confrontation politique. Il n'est pas clair si le gouvernement, que Funes dirige, essaiera d'appliquer ce programme, ou bien s'il le laissera à un prochain gouvernement du FMLN. Il n'existe pas encore de signaux permettant de tirer des conclusions quant à cette question. La réactivation du secteur agricole, qui signifie l'amélioration du niveau de vie à la campagne, ne s'obtient pas simplement par des efforts productifs. Il faut également s’attaquer aux problèmes sociaux les plus pressants, dont en particulier le manque de soins de santé et de scolarité, la dégradation de l'environnement, le manque d'eau et l'insécurité. Si le gouvernement parvient à améliorer la vie rurale, dans un terme de cinq ans, ou si au moins il réussit à donner des preuves que sa politique suit ce chemin, le FMLN s'emparerait d'une grande partie de la base sociale d'ARENA à la campagne, et il pourrait ainsi garantir sa victoire aux élections de 2014, sans laquelle il ne pourrait pas avancer dans la réalisation de son programme. La réactivation de l'agriculture est vitale pour réduire la dépendance vis-à-vis des importations, surtout parce que les principales variables qui permettraient de générer des devises (les exportations et les envois de fonds) continueront à être affectées par la crise mondiale, dont les effets pour le pays se prolongeront encore pendant quelques années. D'ailleurs, avec une agriculture renforcée, l'industrie réduirait également sa dépendance de l'extérieur quant aux biens de production et récupèrerait une partie de sa base nationale. Un autre axe fondamental du programme du FMLN est le soutien aux petites et moyennes entreprises urbaines, pour lesquelles il devra garantir, fondamentalement, les crédits et les marchés. Finalement, l'investissement social, surtout en matière de santé, d'éducation, de logement et d'environnement, est un élément clef pour améliorer le niveau de vie de la population en général, et pour que l'économie améliore sa capacité productive. Le gouvernement ne pourra probablement pas appliquer les mesures qui dépendent du Législatif, comme la modification des structures fiscales et la révision de certaines privatisations. Mais il peut mettre en œuvre une partie importante de son programme, qui dépend de l'Éxécutif. Parmi ces mesures, on trouve les suivantes: 1. Contrôler l'évasion fiscale à laquelle se livrent les grandes entreprises, pour une somme de près de 2 000 millions de dollars américains par an [4], et qui équivaut à 60 % du budget national. Si le gouvernement réussit cette tâche, il pourrait augmenter de façon substantielle ses revenus fiscaux. Il est probable que le gouvernement essaiera de conclure un pacte fiscal avec les grandes entreprises, mais il est peu probable que celles-ci acceptent de payer une partie importante de l'argent qu'elles évitent de contribuer. En conséquence, la table de négociations pour le pacte fiscal devrait devenir la scène d'une lutte nationale autour de la question de l'évasion fiscale. Le peuple devrait faire pression pour que les montants de cette évasion soient connus et pour que les entrepreneurs payent l'argent que la loi leur exige de payer, dont une bonne partie provient des impôts indirects qui sont prélevés sur le peuple. 2. Contrôler certains prix et tarifs des biens et services de base. 3. Hausser les salaires dans le secteur public, si toutefois les revenus publics augmentent grâce au contrôle de l'évasion fiscale. 4. Accorder des subsides, avec une partie des nouveaux revenus, à certains services de base. 5. Déposer dans la Banque centrale une partie du budget national et garantir des crédits aux petits producteurs paysans, de façon individuelle ou en coopérative, et aux micros et petites entreprises dans les villes. Les dépôts des mairies gouvernées par le FMLN, des organisations sociales et ceux de la population qui soutient le gouvernement, pourraient également s'en aller vers la Banque d'État. 6. S'affilier à Petrocaribe, afin d'obtenir des conditions favorables pour le paiement du pétrole importé du Venezuela. 7. S'affilier à l'Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA), afin d'obtenir les bénéfices des projets de coopération faisant partie de cette initiative, à laquelle participent le Venezuela, Cuba, la Bolivie, le Nicaragua, Saint-Vincent et les Grenadines, le Honduras, l'Équateur, Dominique, Antigua et Barbade. 8. Faire augmenter de façon substantielle les fonds publics destinés à l'Institut de la Femme, approuver et mettre en vigueur des politiques destinées à réduire les inégalités dues au genre. 9. Élargir les relations avec les pays d'Amérique du Sud, en particulier avec les économies les plus importantes (le Brésil, l'Argentine et le Venezuela). 10. Légaliser les unités de production de milliers de paysans et de paysannes qui n'ont pas de titres de propriété. Une telle décision dépend de l'Institut de transformation agraire (ISTA), qui n'a pas voulu l'appliquer pendant les gouvernements d'ARENA. 11. Exproprier les terrains allant au-delà de 245 hectares, conformément à l'article 105 de la Constitution. De nombreux propriétaires terriens enfreignent la loi en complicité avec le gouvernement actuel. Ces terrains et certaines propriétés de l'État pourraient être assignés à la population paysanne, qui est de 300 000 personnes [5], lesquelles se consacrent principalement à la production de graines alimentaires (maïs, maicillo, haricots et riz) et, dans une moindre mesure, à des cultures saisonnières à petite échelle (produits maraîchers, fruits, etc.) et à l'élevage d'animaux de basse-cour, surtout destinés à l'autoconsommation. Une partie du secteur paysan (64 000 personnes [6]) appartient à des coopératives agricoles, qui se consacrent à la culture des graines alimentaires. Certaines d'entre elles produisent également du café et de la canne à sucre. 12. Augmenter les ressources des ministères de l'Agriculture et de l'Environnement, pour soutenir la réactivation du secteur agricole et faire face au grave problème environnemental du pays. 13. Développer un programme de réactivation de l'économie rurale, avec des ressources internes provenant de la coopération internationale. Le programme comprendrait la remise de terres par l'État, l'accès à des crédits de la Banque d'État, quelques subsides, la fourniture de biens de production bon marché, de machinerie agricole, l’assistance technique (qui pourrait être obtenue de la coopération avec le Brésil, l'Argentine et le Venezuela), et le rétablissement des prix de garantie pour les petits producteurs. En même temps, il faudrait développer un programme d'alphabétisation, avec le soutien de Cuba, pour éradiquer l'analphabétisme, comme l’ont fait le Venezuela et la Bolivie, et un vaste programme de santé, d'eau et d'hygiène, soutenu par des fonds publics et par la coopération. 14. Pour obtenir le démarrage économique, il faut d'abord s'occuper du problème de la sécurité publique, au moyen d'un programme d'encadrement des groupes de jeunes délinquants, qui incorpore l'emploi, des bourses et d'autres actions de réinsertion sociale. Il faudrait également épurer la Police nationale Civile et les institutions de sécurité de l'État, afin de faire baisser la criminalité et réduire le climat d'insécurité qui règne parmi les habitants. Il faut reconvertir la police en une institution d'appui aux citoyens. Le FMLN a l'avantage d'avoir incorporé dans la police une partie de ses combattants démobilisés, certains d'entre eux ont même des grades de chefs de paliers moyens. Avec le nouveau gouvernement, le FMLN contrôle les principales structures de commandement, incluant la préfecture de police. La réactivation de l'agriculture pourrait permettre de réduire les importations d'aliments, faire face à la concurrence de la production agricole des États-Unis, qui bénéficie de subsides et des privilèges des Accords de libre-échange, et aller au-devant d'une possible pénurie de dollars provoquée par la baisse des exportations et des envois de fonds. En outre, la réactivation de l'agriculture suppose l'élévation du niveau d'emploi à la campagne et l'approvisionnement en aliments bon marché pour les villes, où les conditions de vie s'amélioreraient grâce à l'éradication de l'analphabétisme, au développement de projets de logement populaire et d'eau potable, à l'approvisionnement en médicaments pour les hôpitaux et à l'accès aux crédits et à l'aide technique pour de nombreuses micros et petites entreprises. Avec un investissement public plus important et avec l'appui que signifie la coopération, il serait possible d'obtenir ces résultats. C'est pour cela qu'il est important de contrôler l'évasion fiscale, de s'affilier à l'ALBA et de signer des conventions de coopération avec les principales économies d'Amérique du Sud. Le soutien extérieur pourrait également provenir de la Chine. Bien entendu, il n'est pas question que les ressources externes deviennent la base du démarrage économique et de l'amélioration sociale; elles doivent par contre en être un complément important, surtout pendant les premières années du gouvernement. Les conventions pourraient même se prolonger pendant les cinq années du gouvernement actuel, si l'on considère qu'il échoit à celui-ci de garantir la première phase d'un processus de changements de longue durée. Voilà ce qui constitue les défis et les opportunités du nouveau gouvernement. Nous pensons qu'en appliquant les mesures dont il a été question ici, le gouvernement pourrait faire face avec succès à la crise actuelle, modifier la structure économique du pays et améliorer les conditions de vie de la plus grande partie de la population. ______________________________________________________________________
[1] Organisation politique d'extrême droite fondée en 1981 par le défunt major de l'armée Roberto D’Aubuisson, qui a dirigé les « escadrons de la mort ». ARENA est le parti de l`élite des affaires dans le pays. Il est arrivé au pouvoir en 1989 et il a démarré un programme économique de type néolibéral. En 1992, il a signé les Accords de paix avec le FMLN, qui ont mis fin à la guerre et qui lui ont permis, grâce à son contrôle de l'État, d'approfondir les mesures néolibérales. |
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