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Volume 3, no 1 |
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Mythe : le financement des services de santé au Canada est non viable |
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Pour télécharger le fichier pdf, cliquez ici Mythe : le financement des services de santé au canada est non viableÀ bas les mythes, Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé [1]
Néanmoins, la viabilité financière est généralement décrite comme un phénomène récent découlant des efforts d'un système de santé complet visant à répondre aux besoins grandissants d'une population vieillissante. Ceux qui soutiennent que le système est non viable pointent du doigt le financement et l'administration publics, qu'ils considèrent en partie responsables du problème, plutôt que d'en être la solution. Le remède qu'ils proposent est simple : offrir aux Canadiens une assurance maladie publique moins complète et davantage de services couverts par des assurances privées ou par les contribuables eux-mêmes. Toutefois, aussi simple que cette solution puisse paraître, elle ne tient pas compte de la hausse des coûts, ni de l'ampleur de cette dernière, ni des capacités d'adaptation du régime d'assurance, ni des données internationales, ni, dans une plus grande mesure, des désirs et des besoins des Canadiens. La hausse des prix : non viable ?Il est important de mesurer l'ampleur de la hausse des dépenses en matière de services de santé par rapport à l'évolution du produit intérieur brut (PIB). En effet, ce calcul illustre la façon dont les coûts augmentent comparativement à la capacité de paiement de l'assurance maladie publique. En d'autres termes, il s'agit de se demander combien d'argent il reste à l'État après avoir payé les services de santé. Voici l'explication de l'auteur d'un récent article : Imaginons un pays où les dépenses en matière de services de santé sont de 1 $ par habitant, et le PIB, de 100 $ par habitant. Si, en 50 ans, ces dépenses étaient multipliées par 100, pour atteindre 100 $, et si le PIB augmentait d'un facteur de 10, pour atteindre 1000 $, la somme d'argent restante que les gens pourraient consacrer à des dépenses non liées à la santé serait quand même passée de 99 $ à 900 $ [3].
Certains affirment cependant que le régime d'assurance maladie canadien est un monopole [4] (ou monopsone comme il s'agit d'un acheteur unique). Ainsi, selon cet argument, la concurrence n'existe pas, ce qui entraîne de perpétuels coûts élevés. Si cet argument était vrai, les coûts des services de santé dans les pays où sont financés des systèmes parallèles quasi privés (comme en Australie) ou des systèmes privés et publics (comme en France et en Allemagne) ou encore, des systèmes fondés sur les lois du marché (comme aux États-Unis) seraient beaucoup plus bas que ceux du système public canadien. En fait, les dépenses totales en matière de santé au Canada (correspondant à 9,8 % du PIB) sont comparables à celles de l'Australie (9,5 %), mais sont inférieures à celles de la France (11,1 %), de l'Allemagne (10,7 %) et, de façon plus importante, de celles des États-Unis (15,3 %). Lorsque mesurée par rapport au PIB, la hausse du coût des services de santé n'est pas unique au Canada. Elle survient pratiquement dans tous les systèmes de santé. En outre, elle est davantage modérée au Canada [5]. Par exemple, les dépenses dans le domaine de la santé aux États-Unis, en proportion du PIB, sont passées de 7 % en 1975 à 15,3 % en 2005. Au Canada, les chiffres sont passés de 7 % à 9,8 % au cours de la même période, puis se sont maintenus à environ 8 % à 10 % du PIB national au cours des 20 dernières années. Un problème surgit quand, pour mesurer la viabilité financière [6], les détracteurs sélectionnent des données non ajustées relatives aux dépenses totales en matière de services de santé dans les provinces ou les territoires. Un examen de l'estimation des dépenses à venir peut s'avérer trompeur si les données ne sont pas ajustées en fonction de la croissance et du vieillissement de la population ainsi que de l'inflation [7]. Par exemple, un examen de l'estimation des dépenses en Alberta échelonnées sur 27 ans a démystifié le battage médiatique autour d'une supposée hausse des dépenses de 900 %. Après l'ajustement initial, la hausse était plutôt de l'ordre de 65 %. Grâce à d'autres corrections concernant la richesse personnelle moyenne, les données ont chuté encore une fois pour afficher un maîtrisable 17,5 %.
Qu'est-ce qui entraîne la hausse des dépenses dans le domaine de la santé ?La hausse des dépenses dans certains secteurs du domaine de la santé représente certainement un problème. Même si les dépenses en matière de santé en proportion du PIB n'ont pas beaucoup augmenté depuis les 20 dernières années, la hausse des dépenses dans d'autres secteurs a été remarquable. Dans la plupart des cas cependant, ces générateurs de coût relèvent de secteurs hors du régime d'assurance maladie [8]. Par exemple, les frais des médicaments sur ordonnance - qui débordent de la portée des régimes d'assurance publique et qui sont payés par une combinaison d'assurance publique et privée et par les usagers - ont plus que triplé leur part du PIB au cours des deux dernières décennies. D'autres générateurs de coût comprennent les frais des services communautaires, que le régime public n'a jamais complètement couverts. Un autre problème se posant aux systèmes canadiens de services de santé pourrait être le rétrécissement de l'assiette fiscale, que provoquent souvent délibérément les gouvernements. En réduisant les impôts, ces derniers peuvent rendre « non viable » tout programme public, notamment les services de santé. La viabilité budgétaire est donc une question de choix gouvernemental, mais aussi, plus fondamentalement, de choix de la population. En bout de ligne, la décision de conserver un régime d'assurance complet financé par les contribuables pourrait faire croître l'économie plutôt que d'y nuire. Comme l'ont soutenu plusieurs PDG d'entreprises internationales, les systèmes canadiens de services de santé constituent des actifs économiques, car les entreprises qui s'installent ici n'ont pas à inclure l'assurance maladie dans les frais d'exploitation de leur entreprise [9]. ConclusionLes Canadiens ne se demandent pas si le système de santé est à la mesure des contribuables, mais plutôt s'il sera là quand ils en auront besoin. La réponse à cette question dépend d'un fait simple : le régime d'assurance maladie est aussi viable que les Canadiens souhaitent qu'il le soit. Or, il semble qu'ils le veulent énormément, puisque la plupart des Canadiens se disent prêts à payer des impôts plus élevés pour obtenir davantage de services médicaux de meilleure qualité. Un problème subsiste encore toutefois : il reste à déterminer la façon de réformer le système public de santé en vue d'améliorer le rendement et d'assurer l'optimisation des ressources dans les limites des budgets actuels. ___________________________________________________________________ [1] À bas les mythes est préparé par le personnel de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé et publié uniquement après avoir été revu par des spécialistes sur le sujet. La Fondation est un organisme indépendant, sans but lucratif. Les opinions et les intérêts exprimés par les personnes distribuant ce document ne représentent pas forcément ceux de la Fondation. Nous remercions la Fondation pour son autorisation. |
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