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Volume 3, no 1 |
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Introduction au volume 3, numéro 1 |
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Pour télécharger le fichier pdf, cliquez ici Introduction au volume 3, numéro 1Gilles L. Bourque Éditeur, Revue vie économique
Dans un numéro précédent de la revue, qui portait sur le renouvellement de la social-démocratie, François Béland et Lionel Robert affirmaient : « Dans l’effort pour penser le renouvellement de la social-démocratie en santé, une première tâche s’impose […] celle d’un exercice de clairvoyance sur la conjoncture actuelle, sur les changements annoncés dans l’accès aux services, sur la lecture catastrophiste de l’avenir du système de santé. […] Le système ne va pas si mal, mais il ne va pas si bien non plus. Un système de santé doit s’adapter à de nouvelles circonstances, mais son architecture doit permettre de le redessiner plutôt que de le resoumettre à des transformations structurelles chaque décennie. » Dans le présent numéro, nous désirions donner la parole à des praticiens et à des chercheurs provenant de divers services du secteur de la santé, de manière à dessiner un bilan et à faire une prospective du système québécois de santé. Nous invitons le lecteur à les suivre dans un parcours en trois étapes : une évaluation globale de l’évolution du système; un focus sur des enjeux qui concernent la viabilité du système; une réflexion sur l’architecture du système pour la redessiner au profit des usagers et de la population. Le système de santé fait l’objet d’une inquiétude sociale constante. Il occupe une place importante dans le débat public. Une offensive majeure existe pour le privatiser davantage, sous le prétexte que le système public a trop de défaillances et n’est pas viable. La Revue vie économique souhaite apporter sa contribution à ce débat public en cherchant à répondre à trois séries de questions : A) Comment va le système de santé ? Quelle évaluation générale peut-on en faire : bonne, mauvaise, nuancée ? B) Quels sont les enjeux non résolus qui rendent le système vulnérable ? Quels sont les risques – affirmés ou réels – pour sa viabilité ? C) Enfin, quels pourraient être les compléments au système de santé qui assureraient sa viabilité, sa permanence, et qui lèveraient le doute qui s’accentue dans la population à son égard ? Une politique de santé est-elle réductible à l’offre d’un système de soins ? Comment va le système de santé ? Nous demandons à des personnes qui ont été impliquées dans la planification, la gestion, ou l’étude du système de santé de nous fournir une lecture de l’évolution globale du système : est-ce vrai qu’il va si mal ? Quels sont ses succès, ses manques ? Dans quelle direction évolue-t-il ? Dans une première contribution, Paul Lamarche, ancien sous-ministre au MSSS, aujourd’hui professeur titulaire au Département d’administration de la santé de l’Université de Montréal, répond à ces trois questions cruciales. Ses constats sont d’abord accablants puisque, lorsqu’on la compare aux autres provinces canadiennes, la performance du système de santé québécois reste faible, sinon très faible. Mais, indique l’auteur, il possède aussi des points forts, dont trois méritent d’être signalés : son faible coût, l’équité dans l’utilisation des services et le niveau élevé de la santé de la population. L’article conclut sur les cinq défis qu’il faudrait relever si on veut réellement améliorer le fonctionnement et la performance du système de santé au Québec. Pour Monique Audet, du service de recherche de la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec (FTQ), la difficulté d’accès à des médecins de famille, l’engorgement des urgences et les délais d’attente sont sans aucun doute aujourd’hui les problèmes les plus criants du système de santé au Québec. Ces questions ne sont pas nouvelles, elles nourrissaient les médias il y a déjà plusieurs années. Mais à partir de 2005, elles ont resurgi et n’ont pas cessé d’agiter les lieux de discussion et d’intervention. On peut dire qu’en 2011, ce sont toujours les mêmes questions qui tracassent la population. Dans sa contribution, l’auteure présente trois épisodes qui ont transformé profondément le système de santé depuis 2005 : l’affaire Chaoulli, le règlement gouvernemental sur les centres médicaux spécialisés et l’instauration d’une franchise ou d’une « taxe santé ». Et elle suggère des solutions. Quels sont les risques qui plombent la viabilité du système public ? Une première réponse à ces questions consiste à briser le mythe selon lequel le financement du système de santé serait non viable. Cette réponse nous vient de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, qui publie de courts dossiers sur les divers enjeux de la santé. Le questionnement de la viabilité financière du régime d'assurance maladie, nous rappelle ce texte, est en quelque sorte un « passe-temps national ». Ceux qui soutiennent que le système est non viable pointent du doigt le financement et l'administration publics, qu'ils considèrent en partie responsables du problème, plutôt que d'en être la solution. Le remède qu'ils proposent est simple : offrir aux Canadiens une assurance maladie publique moins complète et davantage de services couverts par des assurances privées ou par les contribuables eux-mêmes. Toutefois, aussi simple que cette solution puisse paraître, elle ne tient pas compte de la hausse des coûts, ni des capacités d'adaptation du régime d'assurance, ni des données internationales, ni, dans une plus grande mesure, des désirs et des besoins des Canadiens. Ce texte remet tout ça dans une juste perspective. La contribution suivante nous vient de Saideh Khadir, urgentologue au CHUM - St-Luc, et membre de Médecins québécois pour le régime public (MQRP). Elle nous présente l’offensive en faveur de la privatisation de notre système de santé, en marche depuis une dizaine d’années au Québec. Présentée comme la solution miracle à des problèmes complexes qui relèvent autant de la gestion, du financement que de la disponibilité de la main-d’œuvre médicale, le processus de privatisation a d’abord été passive et sournoise : soins dentaires, examens de la vue, services diagnostics et médicaments. Mais une privatisation agressive a maintenant pris le relais : pas une semaine sans qu’on nous annonce l’ouverture d’une clinique de chirurgie ou de radiologie privée, d’une agence privée de soins infirmiers ou de centres d’accueil privés pour personnes âgées en perte d’autonomie. Résultat: on assiste à un développement accéléré de services de santé privés de tout acabit. Il est difficile de s’y retrouver tant le développement de l’offre privée de soins est rapide et sans planification ni suivi de leur répartition. Mais derrière le chaos du marché, Saideh Khadir déconstruit ce processus de privatisation. La privatisation pose aussi la question de l’accès aux services. Sur ce point, Marie-Claude Prémont, professeure à l’ENAP, nous rappelle que les personnes de moins de 50 ans n’ont à peu près connu que le régime public de soins de santé. C’est plus de 60% de la population actuelle du Québec, la portion des plus jeunes, pour qui il est difficile d’imaginer ce que serait l’impact sur leur vie d’une privatisation du financement du régime, même partielle. Pour les autres, peu croyait voir de leur vivant un retour aux paiements pour bénéficier des soins d’un médecin. Pourtant, nous dit Mme Prémont, rares maintenant sont les personnes qui, si elles n’ont pas personnellement eu besoin de sortir leur porte-monnaie pour la consultation d’un médecin, n’y ont pas été exposées par les propos d’un proche ou par les médias. Pourquoi les paiements directs effectués par les patients du Québec refont-ils surface ? A-t-on changé les lois pour les autoriser ? Quelles formes prennent au juste ces débours ? Qui en bénéficie ? Améliorent-ils la gestion de l’accès aux soins de santé ? Mme Prémont aborde ces questions en s’interrogeant sur les raisons de cette résurgence et sur les formes bigarrées que prennent ces pratiques. Un autre enjeu majeur est celui du coût des médicaments. Élisabeth Gibeau, de l’Union des consommateurs, aborde cette question en retraçant l’évolution des dépenses en médicaments au Québec. Ces dépenses, nous dit-elle, doivent être considérées comme un enjeu prioritaire pour nos finances publiques. En effet, les Canadiens paient 30% de plus que la moyenne des pays de l’OCDE pour leurs médicaments. Et les Québécois doivent débourser un 8% supplémentaire par rapport à leurs concitoyens canadiens… La situation est donc préoccupante et des mesures efficaces de contrôle des dépenses doivent être envisagées par les gouvernements. L’auteure nous présente la proposition de l’Union des consommateurs, qui préconise l’adoption d’un régime entièrement public d’assurance médicaments. Comment compléter le système de soins ? Comment consolider son avenir ? Le système de services de santé a été pensé dans les années 1960 et 1970 pour une population encore jeune. Deux piliers du système ont alors été développés : les services médicaux et les services hospitaliers. Un 3e pilier ne serait-il pas nécessaire pour adapter le système aux nouveaux besoins nécessités par le vieillissement de la population. De plus, la politique gouvernementale de santé est concentrée sur le système de soins : une telle monopolisation a-t-elle des effets contreproductifs ? Le système de soins ne devrait-il pas faire partie d’une politique de santé plus large, mettant à contribution les différents secteurs d’activités, l’ensemble des niveaux de décision, et les personnes elles-mêmes ? Comment organiser les services de façon efficiente entre les niveaux sans perdre de vue l’objectif premier de la meilleure qualité des soins possible ? L’enjeu du vieillissement de la population sera d’abord traité sous l’angle des mutations qui touchent l’hébergement, avec un accent sur les personnels qui y travaillent. Pour Mélanie Malenfant, conseillère aux communications et au développement de projets au Syndicat québécois des employées et employés de service (SQEES-FTQ), depuis déjà quelques années, les politiques publiques contribuent à des mutations dans ce secteur. Le réseau québécois d’hébergement de longue durée est à la fois public et privé. Dans son texte, l’auteure présente les différences profondes qui existent entre les différents types d’établissement, et les impacts du désengagement de l’État sur la qualité des soins et sur les conditions de travail. Mais plus globalement, la capacité du système de santé à répondre aux besoins d'un nombre croissant de personnes âgées est un des enjeux au cœur du débat sur la pérennité du financement public en santé. La rhétorique dominante est plutôt alarmiste. Pourtant, nous disent les auteurs de ce texte (Louise Lafortune, François Béland et Howard Bergman), le vieillissement augmente surtout les coûts des services de longue durée, qui ne sont que partiellement couverts par les programmes publics. La question que posent les auteurs est la suivante : quel modèle faut-il mettre en place pour répondre aux besoins de cette population ? Ils préconisent de compléter l'architecture du système par une meilleure intégration des services et par un financement élargi des services de soins de longue durée. Dans le dernier texte de ce dossier, Fernand Turcotte, professeur émérite du département de médecine sociale et préventive de l’Université Laval, aborde le thème de la faillite éthique de la médecine en Occident. Il le fait par le biais d’une recension détaillée de l’ouvrage de Nortin Hadler, Malades d’inquiétude ? Diagnostic : la surmédicalisation, qui défend la thèse que la médecine en Occident semble avoir perdu le nord. L’ouvrage explique pourquoi la médecine occidentale est en situation de faillite éthique, déchéance qui n’épargne ni la recherche, ni l’enseignement, ni le service à la communauté et atteint une grande partie des soins dont l’objectif, qui est de soulager la souffrance de l’humanité, est en fait devenue une entreprise fort lucrative d’exploitation d’une population qu’on terrorise avec la peur du vieillissement et la hantise de la mort. Mais l’ouvrage montre que, depuis longtemps, ce n’est pas tant le vieillissement de la population que la médicalisation de trop de manifestations normales du vieillissement qui fait problème. |
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