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Volume 4, no 1 |
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Introduction au volume 4, numéro 1 |
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Pour télécharger le fichier pdf, cliquez ici Introduction au volume 4, numéro 1Par Gilles L. Bourque Éditeur de la Revue vie économique
Les intérêts de plus en plus mercantiles des institutions universitaires, au Québec comme ailleurs, semblent dorénavant l’emporter sur la mission d’éducation, d’outil d’émancipation, qui devrait être la leur. Au Québec, cette évolution débouche sur une concurrence stérile entre les institutions et au dérapage vers des investissements toujours plus importants dans la brique et le béton, plutôt que dans la formation aux étudiants et dans la recherche fondamentale. Alors que les dirigeants d’universités se versent des primes de départ et des augmentations de salaire faramineuses, on peut se demander si une augmentation de 75% des droits de scolarité est légitime. Est-ce vraiment le modèle d’éducation postsecondaire dont nous avons réellement besoin, que nous voulons laisser aux générations futures ? C’est ce dont nous traiterons dans ce numéro. Présentation des articlesLes premières contributions de ce numéro abordent les enjeux de la gestion du réseau universitaire. C’est Marc-Urbain Proulx qui ouvre le débat en s’intéressant plus particulièrement au rôle des universités dans le développement des communautés. Il le fait en se basant sur une étude qu’il a réalisée dans cinq régions innovatrices québécoises. L’offre universitaire de connaissances a toujours bien suivi la demande, nous dit l’auteur. Elle a été un support essentiel au progrès de la société québécoise. Pourtant, dans le contexte d’un monde en changement accéléré, la forte demande de connaissances des collectivités en besoin d’innovation, face à une offre universitaire limitée dans sa capacité d’extension, pose problème. De nouveaux outils seraient en conséquence nécessaires pour poursuivre le soutien universitaire à l’innovation sociale, culturelle et économique. Pour Marc-Urbain Proulx, les universités doivent s’investir encore davantage dans leur collectivité de rayonnement, moins par des briques et du béton que par une insertion qualitative au sein de celle-ci, afin de susciter l’interaction, l’apprentissage collectif et l’innovation. Dans la deuxième contribution, Robert Laplante aborde les risques de dérapage lorsque, justement, les universités se mettent à investir à tout vent dans la brique et le béton. Reconnaissant d’emblée que, lorsque l’on tente de cerner les enjeux du développement universitaire, les choses puissent être relativement complexes, elles ne doivent pas être pour autant obligatoirement compliquées. La transparence de l’information et un langage clair sont à cet égard, nous dit Robert Laplante, des préalables auxquels les responsables et gestionnaires ne peuvent échapper. Or, les brumes qui entourent les projets immobiliers réalisés en partenariat public-privé (PPP) constituent sans aucun doute l’illustration parfaite d’un dérapage en ce sens. Il en donne pour preuve l’exemple concret du PPP de l’UQAR à Lévis, faisant ressortir les faiblesses inhérentes à cette formule de financement pour le développement de projets. Mais au-delà de la formule PPP, nous dit l’auteur, cet exemple permet de questionner une approche de gestion du monde universitaire dont les dérives risquent de remettre en question un modèle de développement qui avait fait ses preuves. La contribution suivante nous vient de Marie Blais. Face à l’internationalisation de l’enseignement supérieur, certaines universités, attirées par la demande croissante venant des pays émergents, désirent se démarquer de leurs concurrentes afin d’attirer un plus grand nombre d’étudiants internationaux. Dans ce contexte compétitif, un instrument d’évaluation d’assurance qualité apparaît crucial : la reconnaissance d’un établissement par une organisation privée certifiant, comme pour une « agence de notation », la qualité des programmes selon un même cadre international. Cet article traite des modèles d’assurance qualité, implantés aux États-Unis et en Europe, qui ont inspiré de nombreux pays, dont le Canada. Au Québec, nous dit Marie Blais, l’implantation d’un tel modèle s’inscrit dans une stratégie plus large du gouvernement Charest de favoriser le positionnement des universités québécoises sur la scène canadienne et internationale. Mais ce faisant, on oublie que l’enseignement supérieur n’est pas un marché; et que la formation, la création et la recherche ne sont pas des marchandises. La dernière contribution liée à la gestion des universités nous vient de Pierre Dubuc. En lien direct avec la contribution précédente, elle développe davantage le portrait de l’industrie des étudiants étrangers, un phénomène mondial en pleine expansion. Au Québec, le nombre d’étudiants étrangers dans le réseau universitaire serait passé, au cours de la période de cinq ans se terminant en 2008, de 9 135 à 22 512, soit une hausse de 146%. Dans les universités québécoises, près d’un étudiant sur dix est aujourd’hui originaire de l’étranger. Mais lorsqu’un gouvernement, nous dit Pierre Dubuc, planifie compenser la chute du nombre d’inscriptions de ses étudiants nationaux, due à une hausse programmée des droits de scolarité, par le recrutement d’étudiants internationaux, et lorsque des universités donnent préséance à leur positionnement dans le palmarès mondial des universités à la scolarisation de leur population nationale, la lutte des étudiants dépasse largement le cadre d’une lutte économique. Elle prend indubitablement le caractère d’une lutte sociale de grande ampleur et elle questionne les fondements mêmes de la société. Dans le texte qui suit, Jean Trudelle dénonce le gâchis de la gestion gouvernementale du conflit étudiant. Pour lui, la contestation étudiante a agi comme un révélateur de l’état de la société québécoise qui nous interpelle à plusieurs niveaux. Les étudiants ont soulevé des enjeux importants, dépassant largement la stricte augmentation des droits de scolarité et l’effet de cette dernière sur l’accessibilité aux études supérieures, interrogeant le mode de financement des universités et la gestion qu’elles font de leur budget. Malheureusement, nous dit Jean Trudelle, il n’y a pas eu de véritable débat sur la place publique. Des échanges télévisés, des éditoriaux et des chroniques, oui, mais autour d’idées reçues, et bien peu de véritables débats procurant des informations contradictoires sur la réalité complexe des enjeux. Heureusement, conclut-il, la contestation étudiante a redonné un immense souffle à l’engagement social et dès lors, a été porteuse d’un grand espoir. Cette bataille a semé des graines et suscité une volonté claire, dans le cœur de la société québécoise engagée, de ne pas baisser les bras. Les deux contributions suivantes nous viennent de spécialistes de l’éducation. La première provient des chercheurs Pierre Canisius Kamanzi, Pierre Doray et Benoît Laplante qui se demandent dans quelle mesure la provenance socioéconomique des étudiants influence les inégalités d’accès à l’enseignement postsecondaire et les caractéristiques des étudiants qui fréquentent aujourd’hui les cégeps et les universités du Québec. La démocratisation du système scolaire québécois amorcée à l’aube de la Révolution tranquille a effectivement ouvert les portes des cégeps et des universités aux jeunes issus des milieux socioéconomiques défavorisés, qui y sont entrés en grand nombre. Pourtant, nous disent les chercheurs, ces derniers demeurent sous-représentés à l’université. En se basant sur les données de l’Enquête auprès des jeunes en transition, ils peuvent, sur ce plan, comparer la situation du Québec à celle de l’Ontario. Leurs résultats confirment que le revenu des parents reste encore aujourd’hui un facteur déterminant de l’accès aux études universitaires, les familles à revenu modeste ayant encore de la difficulté à supporter les coûts financiers des études universitaires pour leurs enfants. La deuxième contribution est de Mircea Vultur, qui se penche sur la valeur des diplômes universitaires sur le marché du travail. Selon lui, l’afflux croissant de diplômés sur le marché du travail pose en effet la question de la valeur de leurs diplômes. Quelle est la performance des diplômés universitaires en termes d’insertion professionnelle? Quelle place le diplôme a-t-il dans l’ensemble des critères mis en avant dans le processus de recrutement de la main-d’œuvre? Quelle est la perception que les diplômés eux-mêmes ont du diplôme comme moyen d’obtenir l’emploi convoité? Pour répondre à ces questions, l’auteur présente dans un premier temps la dynamique de la croissance du nombre de diplômés universitaires, leur insertion sur le marché du travail et l’étendue du phénomène de la surqualification au Canada et au Québec. Dans un deuxième temps, il analyse la valeur du diplôme selon le point de vue des employeurs et les perceptions que les diplômés eux-mêmes ont de l’utilité du diplôme. Selon Mircea Vultur, on assiste, à travers des liens de causalité complexes, à une dévalorisation « monétaire » du diplôme qui affecte sa valeur d’échange et à une dévalorisation symbolique qui met en jeu sa valeur d’usage. L’avant dernier texte est un extrait d’une étude de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) sur les impacts de l’endettement étudiant. Le portrait de l’endettement étudiant au Québec qui est dressé par cette étude est inquiétant. Avant le début du cycle de hausse des droits de scolarité prévu par le gouvernement Charest, on constate que sur l’ensemble de la population étudiante à temps plein au premier cycle, 65 % s’endette d’un montant moyen de 13 967 $ et qu’un étudiant sur quatre accumule plus de 20 000 $ de dettes. De plus, 35 % des étudiants s’endettent auprès d’institutions financières d’un montant moyen de 8 043 $. On constate, sans surprise, que le revenu familial est un facteur important dans le fait d’être endetté et que ces derniers vivent de forts stress financiers, qu’ils sont particulièrement vulnérables face aux institutions financières - qui offrent trop peu d’information sur la gestion du crédit et ses obligations – et sont le plus à risque d’interrompre leurs études. Le dossier sur l’éducation se clôt sur une contribution collective d’un groupe de chercheurs de l’IREC (Jules Bélanger, Oscar Calderon, Yves Richelle et Henri Thibaudin) qui, face au débat sans issu de la crise étudiante actuelle, se demandent s’il est possible de concevoir un système qui permettrait de maintenir un niveau donné de financement des universités en améliorant l’accessibilité aux études universitaires tout en laissant inchangée la contribution des autres citoyens à l’éducation universitaire à travers leurs impôts et taxes. Énoncée en 5 points, leur proposition cherche à répondre à deux problèmes liés à l’éducation universitaire : un problème d’information sur les bénéfices de la réalisation des études et un problème de diminution de la performance scolaire ou de la persévérance scolaire liée au travail durant les études. Ils montrent ainsi qu’il est possible d’accroitre l’accessibilité aux études postsecondaires sans nuire au financement des universités et sans exiger une plus grande contribution des contribuables. |
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